ector
Boece, un lettré écossais du xvr siècle, racontait
une bien étrange histoire concernant une jeune fille de bonne naissance
dont la famille possédait des terres sur les rives du golfe de Moray.
La jeune fille, contre toutes les coutumes de l'époque, refusa toutes
les propositions de mariage que purent lui faire plusieurs nobles de la
région, qui étaient riches, beaux et considérés
avec approbation par ses parents. Finalement, ces derniers exigèrent
une explication de leur fille qui leur confessa qu'elle ne souhaitait pas
se marier parce qu'elle avait déjà perdu Sa virginité
avec un amant qui était " le meilleur du monde " ". Comme ils la
pressaient de leur donner plus de détails, elle ajouta qu'elle ne
connaissait ni le non, de son amant, ni " d'où il venait, ni même
comment il venait " ". De temps en temps, il apparaissait, comme jaillissant
de nulle part, lui faisait l'amour puis disparaissait â nouveau.
Les parents trouvèrent toute cette histoire bien difficile
à croire, pensant que leur fille tenait secrète l'identité
de son amant pour quelques raisons peu avouables, décidèrent
de découvrir la vérité et ordonnèrent à
leurs serviteurs de surveiller étroitement les activités
de leur fille.
Violence et amour
Trois jours plus tard, une jeune servante vint les prévenir
que leur fille s'était enfermée dans Sa chambre et que des
bruits violents de fornication s'en échappaient. Accompagnés
du chapelain de la famille, " un saint homme habile dans l'art d'exorciser
les démons "les parents se précipitèrent et enfoncèrent
la porte de la chambre. Ils virent alors leur fille qui " étreignait
un monstre horrible au-delà de toute description ". Le prêtre
entreprit de réciter les premiers versets de l'Évangile selon
saint Jean. Lorsqu'il arriva à la phrase " le Verbe se fit Chair,..
"
a
créature démoniaque poussa un cri terrible, mit le feu à
tous les meubles de la chambre, et s'évanouit dans les airs, emportant
avec elle le toit de la chambre. La jeune fille.., quelque temps plus tard,
donna naissance à un monstre d'une hideuse apparence...
On appelait ces sortes d'esprits démoniaques, qui prenaient
l'apparence illusoire d'un homme pour séduire les femmes, des incubes,
ce terme venant du terme latin incubo qui signifie littéralement
" poids ", " charge ". On l'appliquait aux amants non humains, parce que
l'on croyait que l'impression de poids sur la poitrine qui survenait certaines
nuits de cauchemar était la conséquence des attentions érotiques
des démons de la nuit.
Faunes et gardiens
La conviction de Boece, selon laquelle un monstre naissait de l'union
d'une jeune fille et d'un démon reflétait une très
ancienne tradition. En effet, des êtres surnaturels - dieux, anges,
ou démons -' pouvaient engendrer des enfants de mère mortelle.
La plupart des héros de la mythologie étaient ainsi considérés
comme à moitié humains, à moitié divins. Ainsi
les gardiens, de la tradition juive, avaient été engendrés,
disait-on par des géants. On croyait que les dieux, les anges, mais
aussi les esprits inférieurs pouvaient procréer des enfants
à moitié humains. Au Vè siècle saint Augustin
se référait aux activités sexuelles des faunes et
des satyres " esprits de la nature mi-homme, mi-bouc ", en Ces termes
De nombreuses personnes qui ont vécu cette expérience,
ou qui l'ont entendu raconter par d'autres, affirment que les satyres et
les faunes, que le peuple appelle des incubes, apparaissent parfois aux
femmes et leur offrent l'amour.
e
même, les sorcières avaient la réputation de donner
naissance à des enfants conçus avec des démons. Mais
comment, se demandait-on alors, des êtres diaboliques, dont le corps
n'était qu'une forme illusoire, pouvaient-ils procréer des
enfants ? La seule explication tenait à la nature des succubes.
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